Curieuse découverte

Morgan avait le droit. Enfin. Elle était en quatrième année, et elle avait donc le droit d'aller dans la forêt d'algues. Combien de fois, lors de son précédent séjour, y était-elle allée! En se cachant... Le temps d'avant était plus heureux. Elle ne manquait pas à ce point de sang humain. Que se passait-il, alors, aujourd'hui? Pourquoi allait-elle souvent voir la directrice, lui demander ce service qui devenait de plus en plus fréquent? Elle la voyait bien dépérir, pourtant, mais elle ne pouvait s'empêcher d'aller lavoir lui prendre un peu de sa flamme de vie... Heuseusement qu'elle ne contaminait son vampirisme que lorsqu'elle avait envie.
Mais là, cela faisait bien deux semaines qu'elle n'avait pas bu une goutte de sang... Morgan avait beau se goinfrer d'aliments de toutes sortes, manger dès qu'elle resentait l moindre petite faim, elle voyait sa peau devenir couleur de cendre; il lui fallait du sang... Du sang d'une personne, d'un bon Atlante grassouillet, ou ne serait-ce que de ce mendiant, là, tout ivre, maigrelet, sale, puant, qui passait en cachette...
Un mendiant qui passait en cachette dans la forêt d'algues??? Etrange! D'expérience, Morgan savait bien que les clochards ne s'aventuraient jamais là-dedans: il y faisait terriblement humide, et tout crève-la-faim qui se respecte sait que l'humidité est la perte des pieds. Eh oui! Les chaussures s'usent plus vite, les champignons poussent aux pieds, et on en est parti pour aller se faire cul-de-jatte, au pire.
Morgan, par simple curiosité, s'approcha du clochard. Mais, curieusement, plus elle s'approchait, plus certains détails se révélaient, étranges: non seulement il avait les cheveux propres, mais en plus, il n'était pas ivre; sa peau était de pêche, et sa santé paraissait idéale. Ce n'tait pas un clochard - il en portait seulement les habits.

"Qui es-tu?" lui dit-elle.

L'étrange homme sans âge tellement il se noyait sous des milions de rides se retourna, la regarda, et sourit de ses dnts blanches et impeccables.

"Morgan, tu es enfin venue", dit-il.
"J'étais sûr que tu serais la seule à t'approcher d'un homme de mon apparence. Je te cherchais."

La vampire sursauta. Il connaissait son prénom? Son caractère? Pourtant, elle ne l'avait jamais vu, cela était certain.

"Tu ne me connais pas, mais moi, je te connais bien, petite fille, continua-t-il de sa voix chevrottante.
Dès ta naissance, je t'ai regardé. Ne cherche pas à me reconnaître; tu ne m'as jamais vu, en effet, comme tu te dis. Je suis là pour t'aider. Ne dis rien."

Le vieillard s'arrêta un instant de parler, et entonna une chanson dans une langue inconnue de tous les mortels; sa voix était différente; elle ne semblait pas sortir de sa bouche, mais des entrailles de la terre, du ciel, de chaque arbre, de chaque insecte; il semblait incarner le monde.

"Pour ne plus jamais voir ta peau devenir aussi grise que la poussière, pour ne plus jamais avoir à te croquer tes poignets ensanglantés, tue un nourisson à l'aide de cette dague, egorge-le sur cet autel, et bois son sang jusqu'à la dernière goutte!!"

A chaque syllabe prononcée, il disparaissait peu à peu; à la fin, il avait complètement disparu. Une dalle de pierre se révéla alors, sur laquelle étaient gravés des signes bizzares et une dague en argent reposait dessus. Sur son manche serti de minuscules pierres précieuses, était dessiné, comme une coulée d'or blanc qui n'aurait jamais séché, une faux.

Soudain, Morgan sentit un hurlement dans sa tête; ce hurlement répétait:
"Je suis la mort! la mort! la mort! la mort! la mort!" et ainsi de suite. La violence du hurlement lui soutira un cri de souffrance; elle s'écroula au sol, inerte.

Une petite heure plus tard, elle se réveilla. Elle crut à un rêve; mais une dague étrange, avec une faux sur le manche, reposait sur une pierre gravée.

La vampire ramassa le poignard; il était dans un fourreau auquel s'attachaient deux sangles de cuir. Elle l'attacha comme un ceinturon, la dague au centre, comme le faisaient les lointaines femmes vikings.

Elle tendit alors brusquement, des bruits de pas faisant crisser les feuilles; elle se retourna.

Il s'agissait de Hélène Da Silva, qui par habitude, venait toujours au bon moment au bon endroit ...

Elle regarda Morgan qu'elle avait déjà rencontré dans les cuisines ...

"Euh ... Bonjour ... Tu vas bien ? J'ai entendu un cri assourdissant et voilà ..."

Elle rougit de honte, de peur aussi d'avoir déranger et de n'être pas la bienvenue.

Morgan, un douloureux mal au crâne et cachant instinctivement l'étui de sa dague, regarda Hélène, les yeux agards.

"Euh... Oui, j'ai, très mal à la, tête, et.... Hum."

Morgan essuya un filet de salive mêlée de sang qui lui coulait sur le menton d'un revers de main.

*Un nourisson...*

"Qu'est-ce que tu fais là, toi? t'es en quelle année?" Dit-elle bruquement.

"Tu te souviens pas ? Je suis la cuisinière et je suis majeure, deux siècles à mpon actif ..."

Elle sourit poliemment.

"Et toi ? Que fais-tu là ?"

Morgan releva sa lèvr supérieure, en une affreuse grimace. Sa main alla à sa dague, s'en retira vivement, et maudissa intérieurement cet être errant qui était à cet instant sur son chemin. Un nourisson.... Plus jamais cette envie...
Morgan se racla pas très élégament sa gorge, se gratta la tête et tourna le dos à Hélène, cherchant à partir de cet endroit maudit de la forêt.

"Ca t'concerne pas." dit-elle d'un ton sans réplique.

Elle continua de marcher vers la lisière de la forêt d'algues.

"Hé ! Pourquoi tu te sens tout le temps agresser ? Tu devrais profiter que je sois morte ... Comme ça tu pourrais me parler sans avoir des envies de vampire ... Et ne me maudit pas dans tes pensées ! Ce n'est pas polie !"

Elle regarda la vampire et la suivit.

"Je ne dirais rien. Ce ne sont pas mes affaires mais on ne peut pas garder un secret bien longtemps ..."

Morgan grommela quelque chose pour elle, mais la fantôme put entendre "fouineuse".

"De toute façon, je ne dois rien dire, parce que rien ne s'est passé, voilà tout", râla-t-elle.

Morgan réfléchit un instant. Hélène commençait sérieusement à la gonfler, et tandis qu'elle marchait, elle éclata subitement d'un grand rire.

"Hé, ma belle, ne t'imagine pas que je vais avoir envie de mordre n'importe qui!" s'exclama-t-elle avec un air on ne peut plus moqueur.

Parfaitement consciente que sa phrase était vexante, elle pris un air satisfait; mais la pensée d'un nouveau-né lui tomba soudain dans l'esprit. Elle chassa violemment cette idée de sa tête, craignant les fouineries de la psychokénèse.

"Fouineuse ? C'est un peu vrai, je l'admets et j'assume ..."

*C'est incroyable ... J'essaie d'être gentille mais elle ne veut rien savoir ... *

Hélène sourit puis éclata de rire, son rire raisonna dans la forêt d'Algues.

La dernière phrase ne la vexa pas mais elle fut déçue par le comportement de la jeune vampire.

"De toute façon, j'ai perdu tout mon sang il y a quelques années ..."

*C'est assez horrible de voir des bestioles te dévorer sans que tu puisses rien faire ...*

Elle fit mine de dégoût suite à cette pensée.

"Tout le monde a un petit secret ... Tu n'y échapperas pas ... Et selon le problème, il te pèsera longtemps, tu pourras sentir ton coeur se serrer petit à petit ... Mais si tu ne me fais pas confiance, je ne peux rien faire ... Mais, demande ton avis à des êtres qui te sont chers ... comme ... le jeune homme qui était dans la cuisine ... Il était bien sympathique ... Je pense que tu pourrais lui faire confiance ... Cependant, il aura des difficultés à digérer selon le secret que tu caches car il ets un peu plus humain que toi ... Mais je ne doutes pas que tu caches un bond fond ... Je veux bien t'aider même si tu ne fais que m'insulter, je n'en ai rien à faire ..."

Morgan leva les yeux au ciel, les bras ballants.

"Hooo, mais pourquoi tu t'obstines comme ça?" dit-elle, exaspérée.

Morgan n'avait pas tilté que Hélène, vu qu'elle était une fantôme, n'avait plus de sang. C'était pour ça, en conclut-elle, qu'elle n'éprouvait aucune attirance à son égard - attirance, dans le sens attraction causée par l'odeur du sang.
Elle écouta le discours de l'esprit. Réfléchissant quelque peu, et troublée par les paroles d'Hélène, malgré sa robe, Morgan s'assit sur un tronc heureusement sec et appuya son menton au creux de ses paumes, ses coudes sur ses genoux.

"Je ne comprends pas, dit-elle alors. C'est... C'est la première fois que ça m'arrive. Chez moi, je veux dire, dans ma famille, là-haut, les lois étaient différentes... Il y avait le maître de maison, c'est à dire mon père, et les autres. Lorsqu'il décidait de quelque chose, alors les autres étaient de son avis. La hiérarchie était très présente... Moi-même étais une supérieure...
Mais ici, ce n'est pas pareil... Les gens sont amis, égaux, et il n'y règne pas d'agressivité sauvage comme chez moi. C'est grâce à ça, je suppose, que j'ai pu retrouver le peu d'humanité que ma mère m'avait légué... Car oui, mais ça, surtout, ne le dis à personne: je suis à moitié humaine, à moitié vampire. C'est pour ça que je ne crains pas le soleil, et que j'ai une durée de vie semblable à celle des humains. Et, Roy... Eh bien, en devenant vampire, il a conservé toute son humanité; c'est peut-être pour ça que je... Que j'éprouve... Des sentiments pour lui... Euh, enfin, je ne sais comment dire, je..."

C'était la première fois que Morgan se confiait à ce point. Toute menue, recoquevillée, elle avait les yeux baissés, comme une enfant. Se balançant légèrement d'avant en arrière, elle entoura ses genoux de ses bras; il n'y avait plus trace, à ce moment là, de vampirisme dans ses yeux; seuls ses dents et son teint d'une pâleur mortelle laissaient deviner sa race.

Pendant que Morgan faisait son petit discours au fantôme, un être fait de chair et de fumée les épiait, un rictus au visage.

*Alors comme ça, mademoiselle a un secret qui ne doit pas être dévoilé... Elle peut compter sur moi! Nihihihiââârk! Hihihihihuhuhuhu!* pensa-t-il.

Dans les yeux une lueur méchante et cruelle, il s'en alla, voletant, dans un bruissement de feuilles d'algues; mais auparavant, il fit demi-tour, et plaça un piège dans l'herbe: il murmura une formule; un trou d'environs un mètre de profondeur d'en se forma alors; il le recouvrit de bâtons et de feuilles; paaarfait, il était bien dissimulé. De cette manière, les deux pimbêches tomberaient dedans. Hihihi! Enfin, à une vitesse hallucinante, le poltergeist regagna la pension.

Hélène entendit des bruissements, cependant elle ne pensait pas qu'un piège l'attendait mais avait tendu un écho dans sa tête : la pensée d'une personne.

"Je te remercie de m'avoir confier tout cela, c'est très gentil ! Je n'en dirai pas un mot, promis."

Puis, elle se remémora la parole pour elle-même.

*Morgan, je crois que quelqu'un dans cet établisssement est plus curieux que moi mais une curiosité malsaine ... Parles-moi par la pensée, c'est plus prudent !*

L'esprit commença à s'inquiéter sérieusement et se demanda qui pouvait avoir une voix si désagrable à écouter et qui avait quelque chose à leur préparer ...

Morgan remercia Hélène.

"Je n'avais jamais dit ça à personne... Vraiment, cet endroit me fait du bien. Il me permet de retrouver un côté humain... Mais je regrette aussi les grandes chasses familiales; j'étais très bonne dans ce jeu.", finit-elle avec un petit sourire.

Aux dires de la fantôme, Morgan haussa les sourcils.

*Comment? Un personnage... Qui nous voudrait du mal?* dit-elle alors en pensée.

*Ben oui ! J'ai cru entendre, grâce à mon pouvoir, une parole peu rassurante avec un rire abominable ! Attends j'essaie de me souvenir : 'Mademoiselle a un secret qui ne doit pas être révélé ... Elle peut compter sur moi' suivi du fameux rire ...*

Hélène Da Silva se leva et se dirigea sans le vouloir, inquiète, vers la fausse et tomba. Elle crioa de toutes ses forces mais remarqua quelque chose : le trou n'était pas assez grand ... 1 mètre environ ? Peu suffisant ...

*Ca n'arrive qu'à moi ce genre de choses ...*

Elle sortit du trou avec difficulté, n'étant pas très dégourdi.

"Morgan, on devrait peut-être partir, tu ne crois pas ? Cette fausse n'est pas très naturelle ..."

Morgan émit un regard inquiet. Suivant Hélène, elle avait voulu la secourir, mais n'avait pas osé: lui passerait-elle au travers? Heureusement, le trou n'était pas profond.

La vampire faillit éclater de rire, mais des soucis bien plus profonds la perturbaient.

"Bon, eh bien on ferait mieux de s'en aller", dit-elle alors.
"Et euh... Tu n'as rien, au fait?"

"Oui, il faudrait qu'on quitte ses lieux ..."

Elle regrda autour d'elle et passa ses mains sur sa robe pour enlever la possière qui s'était installer ...

"Non, je n'ai rien ... Le côté positif de n'être plus vraiment de ce monde c'est de savoir qu'on ne peut plus se blesser ou mourir encore une fois !"

Elle sourit et comprit, à ces paroles, qu'elle ne serait plus jamais aussi maussade qu'à ces premières années en tant que défunte.

Elle prit la main de Morgan pour l'emmener loin de cet endroit.

"Tu veux qu'on aille où ?"

Morgan réfléchit. Elle n'avait aucunement l'intention d'aller quelque part accompagnée. Ce qu'elle voulait, c'était rester seule et penser à ce qu'elle venait de vivre. Elle plissa légèrement les yeux, redevint nomale, regarda dans le vide, se concentra sur une feuille d'arbre, etc...

"Eh bien, je dois aller aux toilettes, en fait", dit-elle brusquement.

Culpabilisant cependant, elle lui fit un signe de la main et commença de partir, dans une direction qui n'était pas très définie, mais à peu près vers la pension.